Mali-Côte d’Ivoire : Le coton permet de tisser des liens économiques

Publié le 31 août
Source : l'Essor

La Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT) utilise principalement les ports de ce voisin du sud pour expédier ses fibres sur le marché international.

Les infrastructures et la qualité des opérations portuaires y sont pour quelque chose.

L’économie malienne tient sur deux piliers essentiels et incontournables que sont la production agricole (agriculture, élevage, pêche) et la production aurifère. Pour la production agricole qui nous intéresse ici, le coton se positionne comme la culture de rente leader et stratégique qui occupe une place de choix dans les recettes d’exportation.

La filière coton représente 15% du produit intérieur brut (Pib) et 25% des recettes d’exportation. En moyenne, le coton représente un chiffre d’affaires de 250 à 300 milliards de Fcfa par an, ce qui justifie bien la place qu’occupe le Mali dans le peloton de tête des producteurs africains.

L’importance de la filière coton se mesure également au nombre d’activités qu’elle génère et fait tourner l’économie à l’échelle locale, régionale et nationale. Par un effet d’entrainement, la production cotonnière implique outre les producteurs et plusieurs autres segments de l’économie comme les transporteurs, les transitaires, les douanes, les fournisseurs de pièces d’usines, de lubrifiants, d’engrais. Par ailleurs, les unités de production d’aliments bétail, d’huile alimentaire extraite de la graine de coton, les entreprises de travaux publics, les banques, etc. sont autant d’activités en lien avec la production de coton.

Au-delà de ses effets d’entrainement très bénéfiques pour l’économie nationale, la filière coton étend ses activités en dehors des frontières de notre pays. À ce titre, la Côte d’Ivoire représente une destination historique pour l’évacuation de la fibre vers le marché international, a révélé Cheick Tidiane O. Doucouré, directeur général adjoint de la Holding Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT). Le port autonome d’Abidjan est secondé par celui de San Pedro, ajoute notre interlocuteur.

Ainsi, la Côte d’Ivoire représente près de la moitié des évacuations du coton vers le marché international (49%), le reste de la production est répartie entre les autres ports de Dakar (Sénégal, 2è position), Lomé (Togo) et tout récemment Conakry (Guinée Conakry) et Nouakchott (Mauritanie) qui sont venus s’ajouter depuis l’instauration de l’embargo de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) en janvier dernier. Ces deux dernières destinations ont représenté la bouée de sauvetage offerte par la Guinée Conakry et la Mauritanie en vue de desserrer l’étau que constituait l’application de l’embargo contre notre pays.

5 À 7 MILLIARDS DE FCFA- La Côte d’Ivoire représente une part non négligeable dans l’expédition du coton malien vers l’extérieur, confirme avec fierté Cheick Tidiane O. Doucouré. Ainsi au cours de la campagne agricole 2017/2018, ce sont 147.300 tonnes de fibres qui ont été évacuées vers ce pays voisin. La campagne suivante ce sont 136.500 tonnes et en 2019/2020, ce sont 129.000 tonnes, soit 44% de la production de coton qui ont été évacués sur la Côte d’Ivoire.

Pour la présente campagne d’exportation, la CMDT est à un peu plus de 50.000 tonnes de fibres évacuées par la Côte d’Ivoire. Et les opérations d’exportation se poursuivent normalement aussi bien sur la destination ivoirienne que sur les autres corridors comme Dakar, Conakry et Nouakchott, révèle le directeur général adjoint. Il précise ensuite que les évacuations de la fibre de coton représentent un chiffre d’affaires de l’ordre de 5 à 7 milliards de Fcfa qui sont versés pour assurer les frais d’assurance, de douane, de transit et de transport. Au retour, les transporteurs chargent du fret constitué généralement d’engrais minéraux qui sont commandés par la CMDT pour la prochaine campagne agricole.

Cheick Tidiane O. Doucouré révèle aussi que la CMDT utilise les ports de la Côte d’Ivoire pour d’autres opérations. Il expliquera à ce propos que les commandes de pièces d’usine, les engrais minéraux (300.000 tonnes en moyenne par an), les produits pétroliers (gaz-oil et pétrole pour les unités d’égrenage et les véhicules), les emballages en polypropylène dans lesquels est emballée la fibre de coton, arrivent généralement par les ports de ce pays voisin.

Ces opérations génèrent des ressources et contribuent à renforcer l’économie ivoirienne. La valeur marchande de ces différentes opérations de transactions tourne autour de 193 milliards de Fcfa. Ainsi les produits pétroliers qui représentent plus de 13 millions de litres par an par la CMDT sont raffinés sur place et ensuite transportés vers le Mali. Il en est de même pour les engrais qui, arrivés en vrac par bateaux en Côte d’Ivoire, sont ensachés sur place avant d’être expédiés vers le Mali.

Signe de l’importance du transit par la Côte d’Ivoire : le géant du coton prévoit de construire un entrepôt à San Pedro pour un investissement de près de 4 milliards de Fcfa.C’est fort de la qualité des opérations dans les différents ports ivoiriens que la CMDT maintient sa coopération avec ce pays voisin. Toutefois, elle se réjouit de l’ouverture vers d’autres ports comme cela a été le cas pendant l’embargo. Cette bouée de sauvetage offert par les voisins guinéens et mauritaniens permet au géant du coton de ne pas mettre tous ses œufs dans un même panier et lui offre l’opportunité de trouver d’autres solutions de rechange si par malheur la situation de blocage de l’économie devrait se répéter.

DIVERSIFICATION

Comme le dit l’adage, «l’appétit vient en mangeant» avec ces nouveaux débouchés trouvés, la CMDT élargit la voilure. Elle envisage d’augmenter progressivement sa production et d’agrandir en conséquence son parc industriel. Pour cela dans le cadre de son plan stratégique de développement de la filière, elle envisage d’améliorer la productivité du coton à travers la recherche agronomique et de s’ouvrir à d’autres filières agricoles rentables et prometteuses comme la culture du soja et du maïs.

Le soja a pour particularité de fixer l’azote dans le sol dont les plantes ont besoin. De ce fait, l’introduction à grande échelle de cette plante va contribuer à l’amélioration de la fertilité des sols dans les zones CMDT en plus du fait que la plante génère des revenus intéressants pour les producteurs. Le soja contribue à améliorer l’alimentation du ménage et est une matière première pour les huileries qui vont extraire l’huile et fabriquer du savon pour les besoins des ménages et du tourteau pour les animaux.

Dans la même veine, le maïs devient de plus en plus une culture prometteuse et rentable pour les producteurs avec l’installation des aviculteurs dans les zones périphériques de certaines grandes agglomérations. Ces aviculteurs ont besoin de cette plante pour assurer le développement de leur élevage de volaille. Ainsi, la promotion de ces deux plantes permet à la CMDT d’augmenter les revenus des producteurs qu’elle encadre et d’assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans ses zones d’intervention.

Source : l’Essor